MEMOIRE SILENCIEUSE : LES FARDC ET LA SOLITUDE DES HEROS TOMBES
- Fungula Marguerite
- 11 mars
- 4 min de lecture
Le Congo est en guerre. Cela ne fait plus débat. À l’Est du pays, des milliers de militaires congolais des Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) se battent chaque jour pour défendre la souveraineté nationale. Ils tombent sous les balles ennemies, ils avancent malgré la peur, ils laissent derrière eux des familles, des épouses et des enfants. Pourtant, que leur offre-t-on en retour ?
FARDC : Honorer nos héros tombés au combat, un devoir national
Aujourd’hui, il est presque impossible de dresser un bilan exact du nombre de militaires congolais morts au combat. Ils sont engloutis dans la masse des victimes civiles, emportés par la tragédie d’une guerre interminable. Et lorsque leurs corps sont retrouvés, ils sont souvent inhumés dans des fosses communes, sans nom, sans hommage, sans reconnaissance nationale. Alors qu’ailleurs dans le monde, chaque soldat tombé est un héros que l’on pleure avec honneur, au Congo, ils disparaissent dans l’anonymat le plus total.
Un oubli qui engendre une profonde injustice
Dans l’histoire des grandes puissances du monde, l’armée est au cœur de la souveraineté. La France, par exemple, ne manque jamais d’honorer ses soldats tombés au combat. Chaque ville possède un monument aux morts, chaque rue ou place porte un nom de héros, et sous l’Arc de Triomphe repose le Soldat Inconnu, symbole de tous ceux qui sont morts pour la patrie sans que leur identité ne soit jamais révélée. Aux États-Unis, les anciens combattants sont traités avec respect, leur mémoire préservée à travers des cimetières nationaux, des commémorations et des aides dédiées à leurs familles.
Mais au Congo, où sont ces monuments ? Où sont ces hommages ? Où sont ces gestes de gratitude envers ceux qui ont donné leur vie pour défendre notre nation ? Aujourd’hui, des soldats meurent et leur souvenir disparaît dans l’oubli collectif. Leurs enfants grandissent sans lieu de recueillement, sans reconnaissance de leur sacrifice. Ils apprennent que leur père ou leur mère est mort pour le pays, mais ce pays ne leur a laissé aucun signe de gratitude.
Cette négligence n’est pas anodine. Elle alimente un sentiment d’injustice profond, surtout chez les populations qui vivent en première ligne du conflit. À l’Est, combien de jeunes se sont enrôlés dans des groupes armés, non pas par idéologie, mais parce qu’ils avaient le sentiment d’avoir été abandonnés ? Combien d’enfants soldats sont devenus des combattants parce qu’ils ont grandi avec l’idée que l’État n’a pas su protéger leurs parents, et pire encore, qu’il n’a même pas daigné leur rendre hommage après leur mort ?
L’injustice est un poison qui se propage lentement, mais dont les effets sont dévastateurs. Si nous ne reconnaissons pas le sacrifice de nos militaires aujourd’hui, nous préparons les fractures de demain. Car un pays qui ne prend pas soin de ses défenseurs ne peut espérer obtenir leur loyauté éternelle.
Il est temps d’agir : Honorer nos soldats, un impératif national
Face à cette réalité, il est impératif que l’État congolais prenne des mesures immédiates pour honorer ceux qui sont tombés au combat. Il ne s’agit pas seulement d’un acte symbolique, mais d’un engagement national envers ceux qui acceptent de risquer leur vie pour le pays.
Il est temps de construire des monuments pour nos héros. Il est temps de leur consacrer des avenues, des places, des hommages publics. Il est temps d’organiser des cérémonies officielles où leurs noms seront prononcés, où leurs familles pourront se recueillir et se dire que leur sacrifice n’a pas été vain.
Il est aussi temps d’agir pour ceux qui sont encore en vie. Aujourd’hui, un militaire congolais est payé moins de 100 dollars par mois. Comment peut-il nourrir sa famille avec un tel salaire ? Comment peut-il servir son pays avec dignité si lui-même est condamné à une vie de misère ? Lutter pour l’amélioration des conditions de vie des militaires n’est pas une faveur, c’est un devoir.
Nous ne pouvons pas attendre la fin de la guerre pour commencer à honorer nos soldats. Chaque jour qui passe sans reconnaissance est une blessure supplémentaire infligée à la mémoire de ceux qui sont tombés. Il n’est jamais trop tard pour corriger ses erreurs, et nous espérons que le régime actuel, ainsi que ceux qui viendront après, comprendront enfin que la force d’un pays repose aussi sur la manière dont il traite ses défenseurs.
Nous, citoyens congolais, avons aussi un rôle à jouer. Nous devons parler de nos soldats, raconter leurs histoires, refuser qu’ils disparaissent dans l’oubli. Nous devons exiger qu’ils soient traités avec respect, que leurs familles soient soutenues, que leur sacrifice ne soit pas vain.
Aujourd’hui, nous sommes en guerre contre un ennemi extérieur. Mais demain, il ne faudrait pas que par notre propre négligence, un autre ennemi naisse parmi nous : celui du ressentiment, celui de la frustration, celui de la colère de ceux qui se sentiront abandonnés par la nation qu’ils ont servi.
Les guerres se gagnent avec des armes, mais la paix se construit avec de la mémoire et de la justice.
À nos soldats tombés au front, que votre sacrifice ne soit jamais oublié.
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