LA DEUXIEME GUERRE DU CONGO : LE CONFLIT DES AMBITIONS ET LE SERMENT D’UN PERE
- Fungula Marguerite
- 11 mars
- 3 min de lecture
Lorsque Laurent-Désiré Kabila s’installe à Kinshasa en mai 1997, le Congo n’est pas en paix. Le renversement de Mobutu n’a pas éteint les tensions ; il les a déplacées. L’homme qui a promis un renouveau national doit gouverner un pays en ruines, fracturé par des décennies de prédation et de guerre. Mais au-delà des défis économiques et sociaux, un autre problème se pose : la présence de ses anciens alliés.
Un pays en sursis : les fractures du pouvoir
Le Rwanda et l’Ouganda, qui ont joué un rôle décisif dans la prise de pouvoir de Kabila, s’attendent à exercer une influence sur le nouveau régime. Mais Kabila, soucieux d’affirmer son autorité, entre rapidement en conflit avec ses soutiens d’hier. En juillet 1998, dans un geste de rupture, il ordonne l’expulsion des troupes rwandaises et ougandaises du territoire congolais. C’est une déclaration de guerre implicite.
Le 2 août 1998, la révolte éclate. Un nouveau conflit s’ouvre, plus vaste, plus complexe, et plus meurtrier que le précédent.
La rébellion éclatée : la guerre devient africaine
Dès les premiers jours d’août 1998, des mutineries éclatent dans l’armée congolaise. Une nouvelle rébellion naît sous le nom de Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD), soutenue par le Rwanda et l’Ouganda. Rapidement, les rebelles s’emparent de Goma et Bukavu, et marchent sur Kisangani. L’objectif est clair : renverser Kabila comme ils avaient renversé Mobutu.
Mais cette fois, le président congolais n’est pas seul. Il fait appel à de nouveaux alliés. L’Angola, le Zimbabwe et la Namibie répondent à son appel, déployant leurs troupes pour défendre Kinshasa. L’intervention angolaise est décisive : en repoussant une tentative de prise de la capitale, elle sauve le régime de Kabila. La guerre s’étend alors bien au-delà des frontières du Congo, impliquant jusqu’à neuf pays africains. Ce n’est plus un simple conflit interne, c’est une guerre continentale.
Les lignes de front : le Congo morcelé
Entre 1999 et 2001, la guerre se stabilise en un conflit d’usure. Le pays est divisé en plusieurs zones d’influence :
• L’Ouest, sous le contrôle du gouvernement de Kabila, soutenu par l’Angola, le Zimbabwe et la Namibie.
• L’Est, tenu par le RCD, appuyé par le Rwanda.
• Le Nord, où une deuxième rébellion éclate en 1999 : le Mouvement de libération du Congo (MLC), dirigé par Jean-Pierre Bemba et soutenu par l’Ouganda.
Ces alliances ne sont pas figées. En 1999, des tensions éclatent entre le Rwanda et l’Ouganda, qui se disputent le contrôle de Kisangani. Trois batailles opposent les armées de ces deux pays en plein cœur du Congo, révélant que cette guerre n’est pas seulement politique, mais aussi économique. Le contrôle des ressources minières (or, diamants, coltan) devient un enjeu majeur, alimentant le conflit bien au-delà des logiques idéologiques.
L’assassinat de Laurent-Désiré Kabila : la fin d’une ère
Alors que la guerre semble sans issue, un tournant dramatique survient le 16 janvier 2001. Laurent-Désiré Kabila est assassiné dans son palais de Kinshasa, par un de ses propres gardes du corps. L’événement plonge le pays dans l’incertitude. Qui est derrière ce meurtre ? Les soupçons se portent sur le Rwanda, l’Ouganda, voire sur des factions internes hostiles à son régime. Mais la vérité restera entourée de mystère.
Dans l’urgence, le pouvoir passe entre les mains de son fils, Joseph Kabila, un jeune officier de 29 ans, méconnu du grand public. Beaucoup doutent de sa capacité à gouverner un pays en guerre, mais contre toute attente, il s’impose rapidement comme un acteur clé du processus de paix.
Vers l’apaisement : la fin d’une guerre, le début d’une reconstruction
Sous la présidence de Joseph Kabila, le Congo amorce un tournant. Les négociations aboutissent à l’accord de Lusaka (1999), puis aux Accords de Sun City (2002), qui marquent la fin officielle de la guerre. Les troupes étrangères commencent à se retirer et un processus de transition politique se met en place. En 2006, Joseph Kabila est élu président lors des premières élections démocratiques depuis l’indépendance.
La Deuxième Guerre du Congo, surnommée la « Grande Guerre d’Afrique », aura été le conflit le plus meurtrier depuis la Seconde Guerre mondiale, avec plus de cinq millions de morts, essentiellement des civils victimes de la famine et des maladies.
Ne jamais trahir le Congo
Laurent-Désiré Kabila s’en est allé, mais son héritage reste. Son fils a pris les rênes du pays, portant le poids d’une nation à reconstruire. La guerre a redéfini les équilibres politiques en Afrique centrale, laissant derrière elle des blessures profondes.
Mais au-delà des batailles, des alliances brisées et des ambitions contrariées, une phrase demeure dans la mémoire collective congolaise : « Ne jamais trahir le Congo. »
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